En Laponie finlandaise, l'éleveur de rennes Juha Kujala ne cache pas son désarroi. Assis près de la dépouille d'un rennes, il évoque une année d'une rare insupportabilité pour sa famille, qui se consacre à l'élevage de ces animaux emblématiques depuis plus de quatre siècles. "C'est la pire année que l'on ait connue ici", confie-t-il. Alors que les rennes sont victimes d'un nombre croissant d'attaques de loups, la situation devient critique.
Cette hausse alarmante des attaques n'est pas due aux maladies ou au changement climatique, mais directement à la prolifération des loups. Selon le ministère de l'Agriculture et des Forêts de Finlande, la population de loups a grimpé de 295 individus au printemps 2024 à 430 cette année, un record inégalé depuis plusieurs décennies. L'Association des éleveurs de rennes estime que 1 950 rennes ont été tués en 2025, une augmentation choquante de presque 70 % par rapport à 2024.
Étrangement, le contexte géopolitique de la guerre en Ukraine est évoqué par les locaux comme un facteur aggravant. Les éleveurs suggèrent que de nombreux loups venus de Russie traversent une frontière de plus de 1 300 kilomètres, se sentant en sécurité parce qu'ils sont de moins en moins chassés en Russie, où de nombreux chasseurs ont été mobilisés pour combattre. "Bon nombre de rennes finlandais seraient victimes des loups russes", affirment-ils.
Cette hypothèse, qui fait écho à une hostilité croissante des Finlandais envers la Russie, est soutenue par plusieurs études récentes. En analysant des échantillons d'excréments et d'urine de loups, le Centre des ressources naturelles de Finlande a noté une augmentation significative de marqueurs génétiques non observés précédemment dans le pays, ce qui confirme l'origine des prédateurs.
Face à cette situation alarmante, le gouvernement finlandais envisage de permettre une chasse partielle des loups, bien que l'espèce soit en danger critique d'extinction. Juha Kujala rappelle aux opposants : "Qu'ils viennent se mettre à notre place. Ils verraient combien il est douloureux de perdre ses rennes."
Ce dilemme pose une question complexe : la conservation des loups contre la survie d'une tradition millénaire d'élevage de rennes. Alors que les éleveurs demandent des mesures de régulation, les préoccupations des défenseurs de la faune ajoutent une couche de complexité à une situation déjà délicate.







