Alors que le gouvernement français insiste sur le fait qu'il n'est pas de son ressort de "vérifier l’information", une enquête récente met en lumière la manière dont l'État finance des initiatives pour structurer des médias à l'international. Ce financement soulève des interrogations sur la frontière entre aide au développement et stratégie d'influence.
L’Élysée, en réponse à des critiques sur l'initiative d'Emmanuel Macron visant à distinguer les "bons" des "mauvais" médias, affirme que l'État ne doit pas s'impliquer dans la vérification de l'information. Cependant, il apparaît paradoxal que l'État joue un rôle clé dans le financement de l'information, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de ses frontières. En France, par le biais d'une allocation de 4 milliards d'euros pour l'audiovisuel public et 175,2 millions d'euros d'aides à la presse pour 2024, l'État se positionne comme un acteur central du paysage médiatique.
À l'échelle internationale, Canal France International (CFI), l'agence publique sous l'égide du ministère des Affaires étrangères, a prévu de déployer près de 18 millions d'euros en 2024 pour soutenir des projets médiatiques dans près de soixante pays. La mission de CFI, qui depuis 1989 œuvre pour la diffusion des programmes audiovisuels, s'est orientée ces dernières années vers la lutte contre la désinformation et la promotion de valeurs telles que l'égalité des sexes et la démocratie. Cette évolution est détaillée sur son site officiel, où elle stipule que "l’amélioration des conditions de vie dans un pays ne peut se faire sans une information fiable et indépendante".
Les financements proviennent non seulement du ministère des Affaires étrangères, mais aussi de l'Union européenne et de l'Agence française de développement (AFD), au cœur des débats sur l'emploi de l'argent public à l'international. Ces investissements soulèvent des préoccupations chez certains observateurs, qui se demandent si ces fonds ne constituent pas une forme de manipulation de l'information au service d'intérêts politiques.
Dernièrement, le CFI a financé des projets notables, tels que la formation de 25 journalistes palestiniennes, ce qui a permis de produire des spots audio visant à promouvoir l'égalité des genres, pour un montant total de 110 000 euros. De plus, des initiatives ont été mises en place pour lutter contre la désinformation au Sahel, allouant 334 000 euros à des organisations africaines de vérification, ainsi qu'un volet de sensibilisation concernant les droits des migrants en Gambie et dans d'autres pays d'Afrique.
Il est clair que l'interaction entre aide au développement et stratégie médiatique est un sujet complexe, et les conséquences de ces investissements devront être examinées de manière rigoureuse par les spécialistes des médias. La question demeure : jusqu'où peut aller l'État dans son rôle de soutien à l'information sans franchir le seuil de l'influence indue?







